Hier, je m'assieds devant la télé pour prendre une petite pause et tombe sur un reportage sur les aînés. Avec effarement, j'entends la commentatrice : "... initiative pour inciter les retraités à sortir ... leur apprendre à trouver un partenaire de jeu ...".

Désolée de paraître cynique encore, mais je ne peux m'empêcher de penser à cette génération qui me traitait d'inadaptée, de dépendante affective, de dinosaure, etc., parce que je prônais les activités collectives plutôt que l'isolement, la collaboration plutôt que l'individualisme, la richesse des enseignements du passé plutôt que l'imagination reposant sur l'ignorance, l'engagement plutôt que les relations superficielles, la participation plutôt que le mépris, ...

Cette génération d'égocentriques qui a sclérosé la société pendant 30 ans ! Avec une ambition démesurée, qui a construit des mouroirs pour se débarrasser de ses vieux, des garderies pour se débarrasser de ses enfants, qui a surconsommé, gaspillé et pollué la planète en répétant qu'on ne peut pas arrêter le progrès, nous a bâillonnés et entravés après nous avoir dit hypocritement qu'elle comptait sur nous pour changer le monde (une façon symbolique de se laver les mains comme Ponce Pilate en nous transmettant sa couronne de fleurs de hippies fanés), a rompu la transmission de la connaissance afin de conserver le pouvoir, et tout aussi égoïstement n'a pas assuré la relève afin de continuer à occuper les emplois pour se désennuyer et continuer à faire de l'argent au détriment de la jeunesse qu'elle traitait de paresseuse, en plus ! Il a fallu l'intervention d'un clown pour dénoncer tout ça, un clown dont ils se sont vite débarassés, en s'en lavant les mains une fois de plus !

Et aujourd'hui, il faudrait prendre conscience de l'importance des vieux dans la famille ? Qu'est-ce qu'elle a de plus que ses parents à nous apporter, cette génération d'incultes égoïstes, arrivistes et opportunistes ? Les garder le plus possible chez eux alors qu'ils ont abandonné les leurs, parents et enfants pour se vouer à leur cher Dieu Travail ? Et nous, les jeunes d'autrefois, qu'ils ont tout autant baffoués, il faudrait encore qu'on ait de la considération pour eux et qu'en plus on les torche et les distraie ? Et les remercier pour ces belles perspectives d'emploi et ce bel avenir qu'ils ont préparé pour nous ?

Alors que tout ce qu'ils méritent, ces individualistes invétérés, c'est le sort qu'ils ont réservé à leurs propres parents : aller crever dans leurs instituts pour vieux, et seuls, puisqu'ils n'ont jamais eu besoin des autres, selon eux, pour réussir -- pourquoi en auraient-ils besoin maintenant ?

Attention, je ne suis pas en train de dire qu'il faut se venger et ne pas s'occuper des vieux, bien au contraire.

Ce que j'aimerais, c'est mettre cette génération de pitoyables minables devant sa réalité, cette génération qui, durant 30 ans, a marché sur les autres pour réussir en prétendant qu'elle n'a pas besoin d'eux, qui a craché sur la solidarité en prétendant que les meilleurs réussissent seuls, et qui se retrouve aujourd'hui vulnérable à son tour, et abandonnée ...